De la Fiac aux salles de ventes

[27/10/2015]

 

Fiac, Officielle, Art Elysées, Slick, Cutlog, Yia, Outsider Art fair, Asia now, Salon Zurcher… la semaine automnale des foires parisiennes devient chaque année un peu plus dense, entre les manifestations parallèles, les initiatives de professionnels (Chambre à part, Private Choice), les expositions blockbuster (Warhol au musée d’art moderne, Picassomania au Grand Palais), les parcours curatés, sans oublier les salles de ventes aux enchères qui se mettent au diapason. Le moteur de cette explosion de propositions, de cette appétence pour l’art et la culture, c’est évidemment la Fiac, « le » grand salon d’art contemporain en France, qui elle-même décline son propre salon « off » avec l’Officielle (69 galeries émergentes, 17 pays différents).

Avec une sélection plus dure et plus internationale que jamais, la Fiac ressemble aux autres grandes foires internationales, puisant chez les grandes galeries anglo-saxonnes telles que Michael Werner, Hauser and Wirth, White Cube, David Zwirner et la Pace…. cette sélectivité lui a indéniablement permis de redorer son blason cette année, auprès d’acheteurs hyper-exigeants ayant fait le déplacement. Malgré la foule et les prix qui fusent, la Fiac conserve d’une profonde élégance qu’elle doit évidemment en partie au lieu, au Grand Palais lui-même.
La Fiac ne s’adresse pas directement à tous les collectionneurs : la plus petite pièce requiert déjà plusieurs milliers d’euros… ou plutôt plusieurs milliers de dollars puisque la monnaie américaine s’est imposée sur le marché, même à Paris. Il y a très peu de dessins et de sérigraphies si bien que la plupart des œuvres ne sont pas négociables pour moins de 50 000 $ ; tant est qu’elles ne soient pas déjà vendues car, à en croire les galeristes, leurs stands auraient été presque entièrement vidés au cours des premières heures d’ouverture du saloon.
Il reste cependant très agréable de déambuler dans les allées, d’admirer la sélection des œuvres et  peut-être davantage encore l’accrochage. De très nombreuses associations sont en effet tout à fait remarquables et chaque galerie apportant un immense soin aux oeuvres sélectionnées pour le show, comme si la FRIEZE ne lui avait pas ravi ses plus belles pièces.

On ressent très vite les tendances du marché, en croisant plusieurs fois les mêmes œuvres : des statues d’Antony GORMLEY ou d’Anish KAPOOR, des toiles de Ufan LEE, d’Alfonso Torsoni et de Hernan BAS. Le travail de ce dernier, exposé en ce moment même à la galerie Perrotin, la plus influente des galeries du Marais, se retrouvait sur deux autres stands de la foire, chez Victoria Miro et Lehmann Maupin. Le marché du jeune Hernan Bas (1978) s’était légèrement fatigué au cours des dernières années et le prix de ses œuvres était tombé sous les 50 000 $ aux enchères. Mais pour sa toute nouvelle série de toiles, il faut vraisemblablement compter le double.

Les prix sont toujours très hauts sur les salons de prestige, et les jeunes artistes qui ont le vent en poupe chez de puissants galeristes se vendent parfois plus chers que des signatures très établies proposées à quelques encablures de la Fiac, côté salles de ventes. Chez Cornette de Saint Cyr ou chez Christie’s par exemple, on constate pleinement la vitalité du marché surréaliste avec la récurrence d’artistes tels que Leonor FINI, Oscar DOMINGUEZ et Roberto MATTA. Cet automne, les sociétés de ventes aux enchères françaises font aussi la part belle à Picasso (dans une ample gamme de prix allant de 2 000 euros à plus d’un million en moyenne), Miro, et Fujita.
Puis, une belle surprise émerge du côté de l’Hôtel Drouot, où la maison de ventes Morand-Morand profitait de l’effet Fiac pour organiser une exposition de prestige et annoncer cinq sculptures de Germaine Richier, lesquelles seront mises en vente le 3 novembre 2015.

Germaine RICHIER, élève d’Antoine Bourdelle (1861-1929), est l’une des femmes artistes majeures du XXe siècle, mais elle n’est pas une artiste surcotée (les cinq sculptures sont annoncées entre 100 000 et 300 000 € en moyenne), surtout lorsque l’on a en tête les prix offerts à la Fiac pour de bien plus jeunes signatures. Les découvertes ne se limitent pas aux salons et le regard mérite d’être élargi sur l’ensemble des œuvres proposées, y compris sur le fameux second marché.