Après Londres, l’art contemporain arrive à New York

[23/02/2016]

 

Après l’ouverture des ventes de Londres qui se sont concluent sur de nouveaux records, c’est au tour de New York de préparer ses grandes ventes d’art d’après-guerre et contemporain dans un contexte économique anxiogène. Qu’importe la morosité boursière, le marché de l’art reste favorable depuis le début de l’année et les clients seront au rendez-vous, les cessions de ventes étant organisées durant la semaine de la prestigieuse Frieze Art Fair de New York (du 5 au 8 mars 2016).

Phillips ouvre le bal le 29 février 2016, avant la Frieze, avec la vente New Now, composée de 27 lots triés sur le volet. Parmi les signatures incontournables que l’on retrouvera quelques jours plus tard chez les deux sociétés de ventes leaders Christie’s et Sotheby’s, citons Mark GROTJAHN, KAWS, Yayoi KUSAMA et Ugo RONDINONE, tous attendus pour des résultats à six chiffres. Christie’s et Sotheby’s offrent un tout autre type de vente autour d’une offre pléthorique de près de 700 œuvres cumulées, qui seront mises à l’encan les 3 et 4 mars. Nous sommes aux antipodes de l’offre volontairement ténue qui ouvrait l’année à Londres. Les sociétés de ventes privilégient les signatures les plus demandées du marché, à travers une sélection d’oeuvres fortes mais sans prétentions millionnaires. L’offre s’ajuste au contexte économique, elle se diversifie tout en restant dense et de haute qualité.

La vente Contemporary curated de Sotheby’s

Sotheby’s poursuit sa formule des ventes « curatées », dont la sélection se veut soignée et branchée. Le principe est simple et efficace : la société de ventes invite des curateurs à sélectionner des oeuvres. En outre, les conseillers pour la vente fleuve du 3 mars comptant 226 lots, sont Helena Skarstedt de la Skarstedt Gallery, Amar’e Stoudemire, Stephanie Mark et Simon Doonan. Outre Helena Skarstedt, les intervenants sont connus dans les milieux de la mode et du sport mais pas dans celui de l’art. Sotheby’s chercherait donc à élargir son réseau en-dehors des grands initiés habituels du champ artistique contemporain. La sélection comprend une gamme de prix large pour élargir le panel d’amateurs, dont des œuvres abordables pour moins de 5 000 $ (avec David BUDD, Paul STAIGER, Ross BLECKNER ou Ernesto NETO). Les estimations les plus hautes sont réservées à une sculpture d’Anish KAPOOR (White dark VIII) et à une toile de Sam FRANCIS (Deux magots), chacune attendue pour passer le seuil des 500 000 $. Un deuxième chapitre de Contemporary curated est prévu le 15 mars, cette fois à Londres, avec d’autres signatures fortes dont Yves Klein, Christopher Wool et Alex Katz.

Christie’s amène 345 lots au Rockfeller center

Le lendemain, Christie’s mènera une vente pléthorique avec une entrée de prix de quelques centaines de dollars (pour une sculpture sur 30 exemplaires d’Arnaldo POMODORO et pour une toile de Gary Stephan). La sélection apparaît très large, étayée des grands incontournables du moment, dont Chris OFILI, Marlene DUMAS, Roberto MATTA, Nan GOLDIN, Cindy SHERMAN ou Jean DUBUFFET, tous proposés avec des œuvres estimées moins de 30 000 $. Le lot phare annoncé en couverture de catalogue est un Hommage au carré de 1963 peint par Josef ALBERS, attendu entre 500 000 et 700 000 $ (Homage to the Square: Orange Tone) après être resté pendant 50 ans dans la même collection privée. Plus étonnant, une gigantesque sculpture de Joel SHAPIRO est annoncée dans la même fourchette de prix (Untitled, 2000-2001, près de quatre mètres de haut). Ce n’est pas moins qu’un record qui est attendu pour Shapiro, dont trois autres œuvres seront dispersées au cours de la même vente. Une revalorisation de l’artiste américain est en cours, d’autant que son record d’enchère n’a pas été rafraichi depuis presque 20 ans (sculpture sans titre vendue 607 500 $ chez Christie’s New York, le 7 mai 1997). Josef Albers devrait lui aussi faire des émules. Cette figure intransigeante et essentielle de l’art du XXème siècle, passée par le Bauhaus et le Black Mountain College, est indéniablement une valeur sûre du marché occidental. Ses prix ont fortement grimpé depuis 2000 (+442%) et on lui doit cinq adjudications millionnaires entre 2006 et 2014. Yayoi KUSAMA fait partie du triumvirat de la vente avec Early Spring (2004) estimée 300 000-400 000 $. 42ème artiste mondial en 2015, Kusama est l’artiste femme la mieux vendue au monde. Ses recettes annuelles ont même dépassé celles de Louise Bourgeois l’année dernière (Louise Bourgeois est en 60ème position mondiale avec 38,8 m$ de recettes annuelles contre 57,2 m$ pour Kusama).

Chez les deux auctioneers, Alexander CALDER est l’artiste le mieux représenté de cette semaine de ventes. Christie’s lui consacre 11 lots (10 dessins et une sculpture estimée 200-300 000 $, Conical Gussets, en mains privées depuis la fin des années 1960), et Sotheby’s pas moins de 30, depuis une paire de boutons tourbillonnants (15-20 000 $) jusqu’à trois sculptures attendues à plus de 300 000 $ chacune. Calder, 16ème artiste mondial selon son volume d’affaires en 2015, est un gage de réussite : son indice de prix affiche une hausse de 592% depuis 2000 et trois de ses œuvres ont passé les 10 m$ depuis 2012.